Épicurien

adjectif


« Épicurien » est utilisé pour la première fois vers 1495. Cet adjectif, employé aussi sous la forme substantive, est un dérivé formé à partir du nom propre « Épicure » et du suffixe « ien ». Il désigne un disciple de ce philosophe grec ou une personne, une chose, qui suit ou invite à cette doctrine. 1704 voit naître le sens courant du mot : un épicurien est alors un individu friand des plaisirs de la table et de la chair, “un bon vivant”. Pourtant il s’agit presque d’un contresens. En effet, en se penchant en détail sur les préceptes de l’épicurisme, on y trouve une morale qui bannit la volupté et la jouissance.

Revenons donc à la source. Né probablement à la fin de l’année -342, Épicure est un philosophe athénien qui fonde en -306 un des plus grands courants philosophes de l’Antiquité : l’épicurisme. Auteur prolixe, on lui attribue plus de 300 ouvrages, dont seulement quelques uns furent retrouvés après sa mort en -270 (Lettre à Hérodote, Lettre à Pythoclès, Lettre à Ménécée, Maximes capitales et Préceptes). Il établit son école dans un petit jardin, ce pourquoi on la désigne parfois sous le nom d’ ”école du jardin ».
Le but principal de la vie selon l’épicurisme est la recherche du bonheur et celui-ci s’obtiendrait par le plaisir. Mais Épicure n’est pas un jouisseur effréné, loin de là. Dans sa lettre à Ménécée, il préconise au contraire une écologie des plaisirs : « Le plaisir dont nous parlons est celui qui consiste, pour le corps, à ne pas souffrir, et, pour l’âme, à être sans trouble ».

On peut résumer la pensée d’Épicure en quatre grands piliers. La première maxime à suivre, c’est celle de ne pas craindre les dieux. Rappelons qu’à l’époque, la religion occupe une place centrale dans la vie des Grecs. Épicure n’est pas athée mais selon lui, les dieux n’observent pas le comportements des hommes et ne sont pas là pour les juger. Ce sont plutôt des modèles de béatitude à imiter. Par conséquent, il ne sert à rien de se gâcher là vie dans l’angoisse de leur sentence.
La crainte de la mort est elle aussi une représentation vaine de l’esprit. En effet, c’est une sensation qu’on ne peut éprouver vivant, puisque tant qu’on vit, nous ne sommes pas morts et une fois mort, nous ne ressentons plus rien !Logique implacable ! Inutile de s’angoisser avec la représentation de quelque chose que nous ne ressentirons pas.
Troisième pilier : il faut croire au bonheur. Épicure le définit comme une sérénité de l’esprit. Celui-ci est possible si l’on se contente de satisfaire les désirs utiles. Le philosophe établit trois catégories de plaisirs : ceux qui sont naturels et nécessaires (comme la faim, le sommeil, la soif) ; ceux qui sont naturels mais non nécessaires à la survie (par exemple le sexe) ; et enfin ceux qui sont ni naturels ni nécessaires (la richesse, le luxe, la gloire …)
Seule la satisfaction des désirs naturels et nécessaires amène à un bonheur stable. Les autres types de désirs ne peuvent jamais être comblés car leur quête est infinie. S’ils amènent un plaisir certain, celui-ci est violent et éphémère. Au lieu de conduire au bonheur, ils génèrent de la douleur, de l’insatisfaction et de l’inquiétude face au besoin toujours renouvelé de devoir se les procurer. La débauche est donc proscrite ! « Nulle volupté n’est un mal par elle-même ; mais il y a tel objet qui, procurant des plaisirs, procure de plus grandes douleurs ».in Maximes
Concernant la douleur, Épicure nous dit qu’elle est supportable grâce à l’esprit. Il faut garder en tête que la souffrance ne dure pas et le souvenir de plaisirs passés peut nous aider à la tolérer.
A l’étude de ses quatre piliers, on voit clairement qu’Épicure est loin de prôner la recherche effrénée du plaisir. Mais alors pourquoi l’épicurisme laisse-t-il derrière lui cette image de « philosophie de bon vivant » ?

On peut émettre deux hypothèses. La première, c’est celle de la calomnie. A l’époque grecque, les écoles philosophiques foisonnent et chacune d’elle veut s’imposer comme détentrice de la vérité. Il est d’usage alors de lancer des accusations contre un adversaire. Ainsi, les stoïciens, qui représentent alors l’autre grand courant de pensée, ont pu faire passer « le jardin » pour un lieu de débauche pour discréditer l’épicurisme.
La deuxième supposition, plus vraisemblable, est largement postérieure à Épicure. En effet, il faut chercher du coté du 1er siècle avant J.C. et des disciples romains de l’épicurisme. Ils popularisent l’épicurisme, perçue comme une doctrine peu compliquée et donc facile à suivre. La Rome antique devient épicurienne. Mais elle assouplit l’ épicurisme originel, à tonalité ascétique, en s’adonnant volontiers aux désirs naturels non nécessaires tels que la passion amoureuse, et à l’excès en matière de nourriture et de vin. Rappelez vous les scènes d’orgies romaines… Alors que le menu favori d’Épicure, c’était plutôt de l’eau et un pot de fromage.

D’autre part, la philosophie d’Épicure va continuer à être décriée, notamment par Cicéron et les chrétiens. Les épicuriens sont parfois traités de « porcs ». Pourquoi ? Parce que l’épicurisme trouve son fondement dans le corps, siège des sensations. Or le corps c’est le siège du péché, la prison de l’âme. Épicure n’est pas un dévot. S’il n’est pas athée, sa théorie remet en cause la théorie de la création du monde par les dieux, d’où son rejet par l’Église chrétienne. Lucrèce, son héritier romain, se montrera largement antireligieux et particulièrement admirateur d’Épicure. Si bien que dans ses écrits poétiques, il le présente presque comme un messie ! Tout cela contribue au déclin progressif de l’épicurisme et à l’avènement du stoïcisme.

Finalement , l’héritage d’Épicure est peut être à chercher aujourd’hui du côté de la psychologie, notamment dans l’approche positive. En tout cas, Épicure fut un des premiers théoriciens à créer une philosophie à visée utile, en se centrant sur la dialectique de l’individu et de ses plaisirs, de ses sensations, plaçant l’indépendance et la liberté en valeurs fondamentales.





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